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« Letterlocking » : au XVIe siècle, des verrous de papier sécurisaient le courrier

Un art du pliage pour protéger d’importants secrets.

Aujourd’hui, nous avons gratuitement accès à des méthodes high-tech de cryptage de nos communications. Mais lorsque les lettres manuscrites étaient le seul moyen de communiquer avec un interlocuteur lointain, mieux valait avoir confiance en son service postal.

Cependant, cette seule confiance ne suffisait pas forcément, surtout pour les têtes couronnées et les personnalités politiques susceptibles d’envoyer des courriers de première importance contenant des secrets à conserver jalousement. À l’époque, il fallait donc redoubler d’ingéniosité pour s’assurer qu’aucune paire d’yeux trop curieuse ne se pose sur sa missive.

La méthode la plus classique était le sceau de cire, qui une fois sec se brise lors de l’ouverture de l’enveloppe, mais ces sceaux pouvaient toujours être imités. Des mécanismes de pliage complexes ont donc été mis au point afin de sécuriser le courrier.

Cette pratique a été nommée letterlocking par Jana Dambrogio, une chercheuse du MIT, après l’étude de lettres des XVe et XVIe siècles retrouvées dans les archives du Vatican. Leurs coins étaient coupés, indiquant qu’elles avaient été fermées en pliant lesdits coins, puis en les insérant dans des entailles scellées à la cire. Il aurait ainsi été très difficile d’ouvrir la lettre sans que son destinataire légitime ne s’en aperçoive.

Sécurisation low-tech

Dans une étude publiée par la British Library, Dambrogio détaille l’une de ces méthodes de sécurisation: le cadenas en spirale. Utilisée par Mary Stuart après la rédaction en 1542 de la dernière lettre de sa vie, cette technique est incroyablement complexe et nécessite plus de trente étapes différentes.

Le cadenas en spirale se nomme ainsi car il consiste à découper partiellement une bande de papier dans la marge de la lettre avant de la faire passer plusieurs fois de manière circulaire dans un trou qui traverse la lettre pliée. Ensuite, une goutte d’eau est versée sur le tout afin que les fibres gonflent et que le verrou de papier soit scellé.

Grace à cette méthode, il devient impossible d’ouvrir la lettre sans arracher le verrou. Lorsque la lettre est ouverte, des trous se forment sur la page et la bandelette de papier se casse en plusieurs morceaux, la rendant difficile à rapiécer.

L’étude de ces méthodes de sécurisation des missives doit se baser sur de nombreuses conjectures, la majorité des documents étant déjà ouverts. Les méthodes de conservation peuvent de surcroît éliminer les traces de letterlocking, comme les traces de pliures. Il est en revanche certain qu’il existait des dizaines de techniques très complexes et que les recherches sur le sujet n’en sont qu’à leurs débuts.

 

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Jean-Philippe Behr

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