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Le Monde : une indépendance capitalistique et financière renforcée

Conforté par la solidité des performances économiques en dépit des crises de l’année 2020, le Groupe Le Monde a annoncé, le 14 avril, la création du Fonds pour l’indépendance de la presse.

En dépit de crises sanitaire et économique d’une intensité historique, grâce à la mobilisation de toutes les équipes et à la fidélité des lectrices et des lecteurs, le Groupe Le Monde a enregistré en 2020 de bons résultats qui consolident son modèle économique. Ces succès renforcent notre liberté éditoriale, également raffermie par un nouveau mouvement au sein de notre capital. A l’occasion de la présentation de nos comptes pour 2020, nous annonçons en effet la création d’un Fonds pour l’indépendance de la presse, structure qui pérennisera l’indépendance capitalistique du groupe.

Bousculé par les répercussions économiques de l’épidémie de Covid-19, le groupe a enregistré en 2020 une baisse de 5,2 % de son chiffre d’affaires. Ce recul traduit à la fois l’arrêt brutal de l’activité publicitaire au deuxième trimestre 2020, mais aussi la fermeture temporaire de nombreux points de vente, notamment dans les gares et dans les aéroports, pendant les périodes de restriction des déplacements. Depuis le début du premier confinement, ce sont plus de 1 000 points de vente de presse qui ont définitivement fermé, auxquels s’ajoutent 700 encore temporairement fermés.

Après la liquidation de Presstalis, principal acteur de la distribution de la presse, les pouvoirs publics ont joué leur rôle aux côtés des quotidiens nationaux, par une intervention efficace, pour sauver à l’été 2020 la distribution de la presse. Mais il reste à l’ensemble de notre profession à mieux prendre en compte la viabilité du réseau des points de vente, qui sont toujours un relais essentiel de nos publications.

Une diffusion record

Dans ce contexte très difficile, la solidité de nos portefeuilles abonnés et la croissance du numérique ont limité l’impact de ce recul du chiffre d’affaires. En 2020, les revenus de nos diffusions, qu’elles soient sur papier ou numériques, atteignent 73 % de notre chiffre d’affaires, et constituent un socle solide pour investir durablement dans la qualité, la diversité et la rigueur de nos contenus éditoriaux.

Portées par une actualité exceptionnelle, les publications du groupe ont toutes affiché de nettes progressions de leur diffusion payée, celle du Monde, par exemple, de 20,75 %. Parmi les publications également en forte croissance, soulignons la place particulière de « M Le magazine du Monde », premier investissement éditorial après la recapitalisation de 2010. Notre magazine, dirigé depuis sa création par Marie-Pierre Lannelongue, affiche en 2020 une croissance de sa diffusion payée de + 24,71 %.

En ce début d’année 2021, ces performances se sont confirmées dès janvier, l’un de nos trois meilleurs mois en audience globale sur notre site et nos applications, ainsi que pour notre recrutement d’abonnés numériques. Cette dynamique a permis à notre titre de consolider sa place de premier quotidien national, acquise en 2020. En février 2021, notre diffusion payée en France a atteint un niveau sans précédent dans l’histoire du journal : 437 000 exemplaires quotidiens. Fin mars, le nombre de nos abonnés numériques approchait les 400 000 personnes.

La croissance de notre diffusion payée est adossée à la visibilité de notre offre éditoriale très large sur le numérique, et accessible par de multiples canaux (Web, application, plates-formes et réseaux sociaux). Depuis plusieurs années, Le Monde investit donc dans les nouveaux formats numériques, afin de renouveler et d’élargir son lectorat. Sur chacun de ces supports, les performances sont remarquables : 1 million d’abonnés à la chaîne YouTube du Monde ; 1,4 million d’abonnés à l’édition quotidienne du Monde sur Snapchat Discover, 200 000 abonnés au compte TikTok lancé par Le Monde il y a quelques mois. Autant de points de rencontre avec la génération des moins de 25 ans, qui manifeste un appétit réjouissant pour l’information de qualité. Autant d’occasions pour nos journalistes de remplir leur rôle en portant des faits vérifiés, et nécessaires au débat public, à la connaissance de ces nouveaux citoyens

Dernière initiative en date sur de nouveaux formats d’information : la rédaction du Monde a lancé, fin mars, un podcast quotidien matinal, « L’Heure du monde », en partenariat avec Spotify. Cette nouvelle offre s’inscrit dans une tendance forte dans le secteur des médias occidentaux et ouvre la rédaction à de nouveaux modes d’expression, tournés vers l’approfondissement de nos informations.

Le pôle magazines, socle de la rentabilité

Dans un environnement en constante mutation, le pôle magazines (Courrier international, La Vie, Télérama, Le Monde diplomatique) reste au sein de notre groupe un socle bénéficiaire, adossé à un lectorat particulièrement fidèle et des contenus toujours aussi exigeants. Dans cet ensemble, on distinguera encore une fois Télérama, qui affiche, en dépit de la crise du secteur culturel, un résultat d’exploitation de 12,6 millions d’euros. La capacité d’investissement de l’ensemble du groupe a longtemps reposé sur le seul modèle économique de cet ensemble structurellement bénéficiaire. Au cours des derniers exercices, ce pôle a aussi préparé sa mutation numérique avec des titres qui affichent de solides portefeuilles d’abonnés numériques, notamment Courrier international (57 000 abonnés numériques) et Le Monde diplomatique (28 000).

Un résultat 2020 de plus de 17 millions d’euros

La solidité de notre pôle magazines, la progression exceptionnelle des abonnements numériques du Monde, et la mobilisation des équipes tout au long de la crise sanitaire ont permis en 2020 d’absorber les pertes publicitaires et les effets de la liquidation de Presstalis, pour aboutir à un résultat opérationnel de + 17 millions d’euros et un résultat net de + 13,7 millions d’euros.

Le groupe enregistre ainsi pour la sixième année d’affilée un bénéfice opérationnel, et pour la cinquième année un résultat net positif. Il doit beaucoup à la fois aux investissements, notamment dans les ressources rédactionnelles, en nette augmentation, mais aussi à la mobilisation continue des équipes, que nous souhaitons remercier ici.

Un nouvel actif pour le groupe : son siège social

En mars 2020, les équipes du Groupe Le Monde se sont installées dans notre nouveau siège, de 23 000 m2, construit et aménagé par les équipes de Snohetta, SRA, Redman, Cicad et Archimage. Cette installation se traduit par une modification du bilan du groupe, avec une augmentation de la dette à hauteur de 198,3 millions d’euros et une augmentation de l’actif à la même hauteur.

Le Fonds pour l’indépendance de la presse

Conforté par la solidité des performances économiques en dépit des crises de l’année 2020, le Groupe Le Monde a annoncé, le 14 avril, la création du Fonds pour l’indépendance de la presse, qui détiendra notamment les actions du groupe qui appartiennent à Xavier Niel.

Cette création participe d’une dynamique qui s’est accélérée depuis 2010, avec la recapitalisation du groupe par Pierre Bergé, Xavier Niel et Matthieu Pigasse et qui vise à renforcer notre indépendance éditoriale, financière et capitalistique. Dès 2010, la refonte des statuts du groupe et la création d’un comité d’éthique et de déontologie ont marqué une première étape. En 2017, à l’occasion d’un renforcement des fonds propres du groupe, le Pôle d’indépendance obtenait dans le cadre d’une modification des statuts du Monde une « golden share » ou « action d’indépendance », protégeant ses droits statutaires quelle que soit sa part du capital. Fin 2019, Matthieu Pigasse et Xavier Niel signaient un accord avec le Pôle d’indépendance lui conférant un droit d’agrément préalable à toute montée significative au capital.

Le fonds de dotation nouvellement créé est doté d’un conseil d’administration constitué de deux personnalités qualifiées, Nicole Notat et Alain Frachon, ancien directeur de la rédaction du Monde ; de deux personnes nommées par Xavier Niel, Roxanne Varza, directrice de l’incubateur Station F, et Jules Niel, aîné des fils de Xavier Niel ; d’une personnalité nommée par Matthieu Pigasse, Anne Le Lorier, ancienne sous-gouverneure de la Banque de France ; et d’un représentant le Pôle d’indépendance, Olivier Milot, président de l’association des personnels de Télérama. Ce fonds détiendra désormais les parts majoritaires que la holding de Xavier Niel possède dans des médias français, ainsi que ses actions de la société Le Monde libre, qui contrôle le Groupe Le Monde et l’Obs. Ces actions seront statutairement incessibles, et une modification de cette disposition statutaire ne pourra intervenir sans un vote favorable du représentant du Pôle d’indépendance.

A l’heure où la propriété de nombreux médias français est en passe de changer de mains, ce qui suscite des craintes, souvent légitimes, dans les rédactions concernées, c’est un mouvement inverse qui intervient ici pour notre groupe et vise au contraire à consolider son indépendance. Nous espérons que d’autres actionnaires structurants s’y associeront en apportant progressivement leurs titres.

A la création de ce fonds, et à ces résultats, nous ne pouvons manquer d’ajouter un autre élément rassurant pour l’avenir et l’indépendance de notre maison : au cours de ces derniers mois, souvent très éprouvants, voire douloureux, pour nombre d’entre nous, le lien avec nos lectrices et nos lecteurs s’est encore renforcé. Vous avez été nombreux à nous faire part de vos encouragements, de votre satisfaction, de votre intérêt renouvelé à prendre connaissance chaque jour d’informations qui donnent du sens et des perspectives à cette époque si confuse. Nous avons, plus que jamais, besoin de ce soutien pour accomplir notre tâche, et nous vous remercions d’avoir été si nombreux à nous l’avoir apporté.

 

Lire : Le Monde du 16 avril

 

Jean-Philippe Behr

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