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La lutte contre les prospectus publicitaires divise les députés

Après d’âpres débats, les parlementaires ont adopté un article du projet de loi Climat, actuellement examiné en commission spéciale, qui propose d’expérimenter une distribution des imprimés uniquement dans les boîtes aux lettres marquées d’un « oui pub ».

Le projet de loi Climat et Résilience va-t-il signer la fin des prospectus publicitaires dans les boîtes aux lettres ? L’un de ses articles, adopté mais âprement discuté ce jeudi en commission spéciale à l’Assemblée, prévoit que leur distribution soit autorisée uniquement quand les particuliers ont expressément indiqué sur leur boîte qu’ils étaient d’accord pour les recevoir.

Le gouvernement a proposé que des collectivités locales volontaires expérimentent l’interdiction d’imprimés papiers ou cartonnés pendant trois ans. Les imprimés plastiques sont également concernés.

Du « Stop Pub » utilisé par environ 30 % des Français et que la loi anti-gaspillage a récemment rendu plus contraignant (avec des amendes plus lourdes à la clef en cas de non-respect), on passerait donc au « Oui Pub ». L’idée est d’accélérer la lutte contre le gaspillage et d’améliorer l’efficacité de la distribution.

Trente kilos par an

En 2019, plus de 30 kilos de prospectus en moyenne ont été déversés sans accord dans les boîtes aux lettres de chaque ménage. Soit au total 894.000 tonnes d’imprimés publicitaires non adressés « dont une part significative aura été jetée sans avoir été lue », selon les estimations de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Si des grands noms de la distribution comme Monoprix ou Ikea ont décidé de les arrêter, la plupart des enseignes alimentaires restent très attachées à ces tracts , chaque campagne générant du trafic et tirant le chiffre d’affaires. Tout comme une partie des Français, d’ailleurs, qui les jugent utiles pour traquer les bonnes affaires.

Les trois quarts d’entre eux se déclarent toutefois ouverts à ce qu’un système inverse au « Stop Pub » soit testé et appliqué dans leur commune, d’après une étude publiée ce jeudi par l’Ademe. Mais l’Agence alerte sur « conséquences sociales potentielles ».

Dimension sociale

Au sein même des députés de la majorité, au vu des amendements déposés, les avis divergeaient. Certains souhaitaient une interdiction de la distribution directe des prospectus sans passer par la case expérimentation. Ils pointaient que « la fabrication, la distribution, le ramassage et le recyclage de ces imprimés représentent un coût considérable », pour l’environnement, les collectivités et la qualité de vie des citoyens.

D’autres réclamaient au contraire la suppression de l’article, estimant que « des milliers d’emplois […] sont à risque ». Ils ajoutaient que « cette mesure aurait également des conséquences importantes sur les TPE/PME locales qui communiquent beaucoup par le biais des imprimés papiers ». Ces amendements ont été rejetés.

L’association Culture Papier, qui rassemble les acteurs de la filière papier, a déploré dans une tribune « une reprise du débat papier = gaspillage qui n’est pas loin de l’acharnement ». Elle défend le fait que le papier soit une ressource naturelle recyclable « cinq à huit fois » et assure que restreindre la publicité papier « entraînera un report de la publicité vers des médias plus polluants ».

Sujet complexe

Pour Michaël Pinault de la Fédération communication conseil culture de la CFDT, le « Oui Pub » « reprend de très bonnes intuitions » mais « la dimension sociale et économique n’a pas été prise en compte ».

Selon lui, l’imprimerie, la presse quotidienne régionale et la distribution directe « où il y a énormément d’emplois précaires » pourraient être impactées « de manière forte ». « Il y a des dizaines de milliers d’emplois en France qui dépendent de cette activité, il faut donc accompagner l’ensemble de ces filières ».

« Il y a un vrai sujet emploi », pour la corapporteure Aurore Bergé, qui a donc proposé via un amendement que « les collectivités puissent définir des exemptions sectorielles, notamment à destination du secteur culturel et de la presse ».

Lire : Les Echos du 11 mars

 

Jean-Philippe Behr

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