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« La Provence » fait le pari de l’innovation et de la proximité pour se relancer

Pour enrayer la baisse de ses ventes, le quotidien régional se réinvente. CMA CGM, son propriétaire, investit massivement pour relancer le titre qui a limité ses pertes, cette année.

Jouer la proximité. Jusque dans les voitures, dans les salons, voire les chambres à coucher… c’est le credo de « La Provence », qui mise à la fois sur un maillage local plus fin et sur la multiplication des points de contacts avec son audience. Le quotidien du sud de la France lance officiellement samedi un nouvel outil audio, Max, utilisant l’intelligence artificielle, pour faire écouter les articles.

L’objectif ? Fidéliser et conquérir de nouveaux lecteurs. « Dans les études auprès des Provençaux, on sent un gros attachement à la marque La Provence, mais aussi un manque de temps pour lire le titre. On veut valoriser pleinement la production de nos 165 journalistes, note Jean-Christophe Tortora, directeur général de CMA Média. C’est un vrai pari industriel. »

L’IA de Mistral

Le projet, qui représente « quelques millions d’euros », utilise notamment des outils de Mistral AI, avec lequel CMA CGM a passé un gros contrat. Pour Jean-Christophe Tortora, cette innovation dans l’audio est l’un des ingrédients pour « faire entrer ‘La Provence’ dans une nouvelle dimension, trois ans après le rachat par CMA CGM, quand le titre était dans une situation difficile. »

Le journal s’est donné des objectifs ambitieux : 10.000 écoutes par jour dans les six mois, soit environ un tiers du parc d’abonnés (numérique et papier). Le journal réfléchit aussi à utiliser l’IA pour aider à corriger des papiers, en 2026.

Mais cette nouveauté n’est pas la seule. A partir d’octobre, le quotidien va être imprimé à Vitrolles (près de Marseille) en format tabloïd, avant un changement de formule en 2026. « Nice Matin » sera mis sous presse au même endroit au printemps 2026.

Alors que Rodolphe Saadé était opposé à Xavier Niel (propriétaire du quotidien niçois) pour reprendre « La Provence », les deux grands patrons s’étaient accordés sur un pôle d’impression commun initialement prévu dans le Var. Le financement autour de 10-15 millions d’euros sera conjoint via une coentreprise. Ce changement d’imprimerie a entraîné une cinquantaine de départs et reclassements.

Enfin, le dernier gros chantier a été l’embauche de correspondants locaux, « avec l’objectif de couvrir tous les territoires, et pas seulement les grandes villes », explique Jean-Louis Pelé, directeur général du groupe. Et le titre compte « muscler » son offre sur l’économie et la santé.

Reste à savoir si ces changements seront suffisants pour relancer la machine. « La Provence » subit de plein fouet la baisse des ventes de la presse régionale. Sa diffusion payée est à peine supérieure à 50.000 exemplaires par jour, alors qu’elle dépassait 70.000 en 2021. Entre juillet 2024 et juin 2025, la chute a été de 11 %, la deuxième moins bonne performance de la PQR, selon l’ACPM.

90 millions injectés

Pour Jean-Louis Pelé, la hausse du prix de vente du journal (à 1,90 euro) en 2024 a fortement pesé. Il fait valoir des audiences numériques en augmentation (+15 % depuis janvier) et un parc d’abonnés numériques qui a remonté cette année (à plus de 10.000).

En 2025, le chiffre d’affaires total de « La Provence » devrait atterrir sur une fourchette de 45 à 48 millions d’euros, contre un peu moins de 50 millions en 2024. Les pertes devraient passer sous la barre des 10 millions, un résultat en amélioration de 35 %. « ‘La Provence’ entre dans une nouvelle phase », assure Jean-Louis Pelé.

Depuis trois ans, CMA CGM a injecté près de 90 millions d’euros dans le titre (hors prix d’acquisition), incluant l’absorption des pertes, le coût de la clause de cession, la réorganisation éditoriale, l’installation dans le nouveau siège, à Marseille, et l’imprimerie.

Lire : Les Echos du 19 septembre

Jean-Philippe Behr

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