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Rossel, nouveau propriétaire du quotidien régional « Paris-Normandie »

Une soixantaine d’emplois sont menacés par le rachat du journal normand par le leader de la presse francophone en Belgique.

 

Pas de joie éclatante, ce lundi 15 juin après-midi au tribunal de commerce de Rouen, après que les salariés de Paris-Normandie ont appris que le groupe belge Rossel (La Voix du Nord) devenait leur nouveau propriétaire. Juste une satisfaction en demi-teinte, pour une décision qui ressemble à un répit. « On est soulagés, mais pas heureux. On va quand même voir une soixantaine de collègues partir » sur les 240 CDI que compte actuellement la société, résumait Anne Bouchet, déléguée syndicale SNJ. « Le choix de Rossel, c’est ce que l’équipe espérait, s’est félicitée leur avocate Jessy Lévy. C’est un spécialiste de la PQR (presse quotidienne régionale), son offre était financièrement la plus solide et celle qui occasionne le moins de casse sociale. »

 

Alors que ne restaient en lice que deux offres, la crainte était vive que le choix des administrateurs judiciaires se porte sur celle du groupe IPM, associé au holding Fininco de Jean-Louis Louvel. Actionnaire majoritaire depuis 2017 du quotidien normand diffusé à 41 000 exemplaires (en baisse d’environ 7 % sur un an) et au chiffre d’affaires de 29,4 millions d’euros pour une perte de 532 368 euros à la fin 2019, Jean-Louis Louvel s’est présenté aux dernières élections municipales rouennaises (sous l’étiquette LRM), non sans provoquer la désapprobation de la rédaction.

 

« Une belle marque »

 

Surtout, son projet de reprise a ensuite provoqué une colère et une déception encore plus grandes : intervenu après qu’il a mis le journal en liquidation, le 21 avril, il lui permettait d’apurer au passage une dette d’environ 7 millions d’euros. Même Romuald Uzan, le président et directeur de la publication, réputé proche de Louvel, avait estimé l’offre de Rossel supérieure à celle de son ami.

 

« Nous ne cachons pas que nous sommes contents d’acquérir Paris-Normandie trois ans après notre précédente tentative », confirme Eric Berthod, le directeur général délégué du groupe Rossel en France, leader de la presse francophone outre-Quiévrain et « troisième acteur de la PQR en France et des résultats toujours positifs » (chiffre d’affaires consolidé de 505 millions d’euros, 3 740 employés, 70 titres dont 14 quotidiens, des fonds propres de 250 millions d’euros). « C’est un très beau titre, une très belle marque, qui va représenter 10 % de notre chiffre d’affaires, ajoute-t-il. Notre écosystème n’en aura que plus de pérennité. Quant aux salariés, ils seront ravis de refermer une parenthèse difficile. »

 

Même si le quotidien continuera de sortir sept jours sur sept, l’accent sera mis sur le développement du numérique

 

Avec un CSE extraordinaire dès ce mardi 16 juin, une autre s’ouvre déjà, qui provoquera avant toute chose le départ d’une soixantaine de salariés. « Le collège le plus impacté sera celui des ouvriers du Livre », reconnaît le dirigeant, confirmant l’apport d’1,65 millions d’euros en abondement. « La pyramide des âges » serait en effet plus « favorable » à l’imprimerie, où une grève avait été déclenchée lorsqu’à la lecture des différentes offres des repreneurs, fin mai, il était apparu qu’aucun n’envisageait sa reprise – pas plus que la RNP, la régie publicitaire. Des synergies industrielles se profilent en effet avec d’autres entités du groupe, à commencer par Le Courrier Picard, installé sur une zone géographique limitrophe.

 

Surtout, c’est la capacité d’investissement du groupe, et la structuration de son offre, qui ont inspiré la confiance tant des salariés que du tribunal de commerce de Rouen. Même si le quotidien continuera de sortir sept jours sur sept, l’accent sera mis au plus tôt sur le développement du numérique, « très gourmand en investissements ». « Les audiences, on les a, assure Eric Berthod. C’est leur monétisation qui pose problème. »

Un nouveau découpage territorial des éditions locales (actuellement au nombre de sept) pourrait être mis en place d’ici à quelques mois ainsi qu’une nouvelle maquette du journal. Afin que 2021 donne le signal d’un nouveau départ pour Paris-Normandie, que les salariés espèrent aussi concluant que ceux du Courrier Picard et de L’Union (quotidien de Reims), eux aussi relancés par Rossel.

 

Lire : Le Monde du 15 juin

 

Jean-Philippe Behr

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