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La télévision veut bénéficier de la manne de la fin des prospectus

Les grandes télévisions ont commandé une étude au BCG, pour essayer de faire bouger les règles en matière d’interdictions publicitaires sur le petit écran sur la promotion de la distribution. La radio et la presse ne l’entendent pas de cette oreille.

Et si la mort programmée des bons vieux prospectus était l’occasion de revoir les règles relatives à la publicité sur chacun des médias ?

En tout cas, la télévision y réfléchit. Le SNPTV (Syndicat national de la publicité télévisée), regroupant les régies de TF1, M6, France Télévisions, Altice etc. a commandé une étude au Boston Consulting Group (BCG) en septembre – non publique mais que « Les Echos » ont pu consulter.

Cette étude, qui a pour objectif d’étudier « l’ouverture de la publicité TV à la promotion dans la distribution », pourrait modifier grandement les équilibres. Alors que nombre de distributeurs ont réduit voire arrêté les prospectus papier à l’image notamment de Leclerc, sur fond de contraintes environnementales (dispositif « oui pub », limitant les prospectus aux foyers qui le souhaitent), d’augmentation du coût du papier etc., la télévision aimerait bien profiter de la réallocation des investissements.

Une manne de 150 millions d’euros

L’idée serait donc de revenir sur l’interdiction des promotions de la distribution sur le petit écran, sachant que les acteurs comme Lidl, Leclerc, Intermarché etc. sont des investisseurs très dynamiques en publicité. Il faut rappeler que plusieurs secteurs sont interdits de publicité en télévision en particulier l’édition littéraire et les promotions de la distribution. Or, les grands groupes « poussent » régulièrement pour revenir sur ces limitations.

L’étude du BCG explique qu’en profitant de la fin des prospectus papiers, la télévision pourrait capter autour de 150 millions d’euros (en comptant la fin des prospectus et la croissance du secteur). Précisément, le cabinet de conseils estime à 500 millions le budget « prospectus » qui pourrait être réinvesti dans les médias dans les prochaines années, dont la télévision prendrait potentiellement une partie. Ce serait une manne non négligeable, dans un contexte relativement difficile : au premier semestre, la télévision est – avec la presse – le seul des grands médias à avoir vu ses recettes publicitaires baisser (-7,7 % par rapport au premier semestre 2022), à 1,6 milliard d’euros.

Pour le BCG, le risque est que ce soit encore le numérique le grand gagnant de la réallocation des investissements publicitaires, sans changement de règles. La radio risque la « saturation », avec des difficultés pour absorber la manne supplémentaire et les audiences de la presse ne sont pas « suffisantes » pour remplacer les prospectus, selon le BCG.

Selon les analystes du BCG, si les interdictions de la publicité étaient revues, la télévision capterait « sa juste part » de la croissance du secteur « sans préjudice ni pour la radio, ni pour la presse », qui croîtraient également d’ici à 2027.

La télévision a commencé à en discuter avec le gouvernement, mais aussi avec les autres médias pour essayer de trouver un terrain d’entente sur ce sujet épineux.

La presse et les radios locales vent debout

Car presse et radios ne l’entendent pas de cette oreille. La presse ne serait pas favorable à revoir les interdictions, selon nos informations. « C’est une très mauvaise idée et un mauvais signal, alors que la presse ne se porte pas au mieux », juge un bon connaisseur.

« La grande distribution représente la moitié du chiffre d’affaires des radios indépendantes. On a déjà perdu des parts de marché à cause de l’arrivée de la publicité segmentée . Ce n’est pas aux radios de compenser les problèmes que subit la télévision, explique Christophe Schalk, président du SIRTI (170 radios) , qui a commencé à se mobiliser auprès des parlementaires. Il ajoute : « Il y va de la survie des radios en région ». Le Bureau de la radio, qui regroupe les grandes régies radios dont celle de M6 (qui possède RTL), ne fait pas de commentaire, de son côté.

La balle est désormais dans le camp du gouvernement, qui ne va sans doute pas trancher tout de suite, alors que les Etats généraux de l’information viennent de s’ouvrir . Une étude prospective lancée début octobre par l’Arcom et la DGMIC (au sein du ministère de la Culture) sur l’avenir du marché publicitaire et son impact sur le financement des médias sera sans doute l’occasion d’y voir plus clair. Ses conclusions sont attendues début 2024.

 

Lire : Les Echos du 30 octobre

 

Jean-Philippe Behr

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