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Google a signé un accord pour rémunérer la presse française au titre du « droit voisin »

Cet accord, obtenu après des négociations mouvementées, « fixe le cadre dans lequel Google négociera des accords individuels de licence avec les membres » de l’Alliance de la presse d’information générale.

Les négociations, mouvementées, auront duré plusieurs mois. Google et l’Alliance de la presse d’information générale (APIG, qui représente les quotidiens nationaux, dont Le Monde, et la presse régionale, quotidienne et hebdomadaire), ont annoncé jeudi 22 janvier la signature d’un accord ouvrant la voie à la rémunération de la presse hexagonale par le géant du Net au titre du « droit voisin ».

Au nom de la directive européenne sur le droit d’auteur, la presse française réclame la rémunération de la reprise d’extraits de ses contenus dans le moteur de recherche. Dans un communiqué commun, les deux parties soulignent qu’il s’agit de « l’aboutissement de nombreux mois de négociations dans le cadre fixé par l’Autorité de la concurrence ».

Des accords individuels avec chaque média

Cet accord « fixe le cadre dans lequel Google négociera des accords individuels de licence avec les membres » de l’APIG, expliquent les signataires. Il s’agira d’accords de licence qui « couvriront les droits voisins, et ouvriront en outre aux journaux l’accès à News Showcase ».

Ce nouvel espace a été créé par Google pendant les négociations pour accueillir des contenus entiers de médias dans un nouvel onglet de son moteur de recherche d’actualités. Les médias, qui seront rémunérés pour ces contenus, pourront y publier des articles ou des formats innovants. Les médias payants pourront, eux, y afficher certains articles rendus gratuits pour l’occasion.

Selon le communiqué, la rémunération des éditeurs sera calculée individuellement et « basée sur des critères tels que, par exemple, la contribution à l’information politique et générale, le volume quotidien de publications ou encore l’audience Internet mensuelle ». Reste à savoir à combien cette manne pourrait représenter pour la presse française, les données financières de l’accord étant confidentielles. Contactés par l’Agence France-Presse (AFP), Google et l’APIG n’ont fourni aucune précision à ce sujet.

« Nouvelles perspectives »

Pour Pierre Louette, PDG du Groupe Les Echos-Le Parisien et président de l’APIG, cet accord « marque la reconnaissance effective du droit voisin des éditeurs de presse et le début de leur rémunération par les plates-formes numériques pour l’utilisation de leurs publications en ligne ».

De son côté, le patron de Google France, Sébastien Missoffe, y voit la confirmation d’un « engagement » qui leur ouvre « de nouvelles perspectives ». Isabelle de Silva, présidente du gendarme de la concurrence, a, quant à elle, salué « une bonne nouvelle », rappelant que « c’est un moment important dans un processus qui dure depuis plusieurs années ».

L’APIG et Google reviennent de loin : la presse française avait accusé à la fin de 2019 Google de bafouer le droit voisin, ce droit similaire au droit d’auteur, créé par une directive européenne et censé conduire à un meilleur partage des revenus du numérique au bénéfice des éditeurs de journaux et des agences de presse.

Ce nouveau droit à peine entré en vigueur en France, Google avait décidé unilatéralement de moins bien référencer les journaux qui refuseraient de le laisser continuer à exploiter gratuitement leurs contenus (titres, extraits d’articles et vignettes) dans ses résultats de recherche. La presse française, n’ayant guère le choix, avait obtempéré mais en saisissant aussitôt l’Autorité de la concurrence, qui avait ordonné en avril 2020 à Google de négocier « de bonne foi » avec les éditeurs, une décision confortée ensuite par la cour d’appel de Paris.

De précédents accords avec certains titres de presse

C’est dans ce cadre de négociations que Google s’était dit en octobre proche d’un accord cadre avec l’APIG, puis avait annoncé en novembre avoir conclu des premiers accords individuels avec certains titres de presse (Le Monde, Le Figaro, Libération et L’Express).

Cet accord-cadre, d’une durée de trois ans, ne couvre pas toute la presse écrite française, notamment les agences de presse, dont l’AFP, toujours en pleines négociations avec Google, tandis que les discussions avec le Syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM) et le groupe américain ont jusqu’ici tourné court.

 « Je me réjouis que la reconnaissance du droit voisin se matérialise pour la première fois en Europe et nous attendons, maintenant que le premier pas, qui est toujours le plus difficile, est fait, que Google continue sur sa lancée et étende cette reconnaissance aux autres acteurs éligibles, dont les agences d’information », a commenté le PDG de l’AFP, Fabrice Fries.

De son côté, le Syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM), dont les discussions avec Google avaient tourné court l’an dernier, a annoncé maintenir sa plainte contre le géant du Net. Il assure qu’il poursuit « ses efforts pour obtenir une juste rémunération de la création de valeur à laquelle participe toute la presse française et dont Google bénéficie grandement », et appelle à une « négociation encadrée » avec le groupe.

Lire : Le Monde du 21 janvier

 

Jean-Philippe Behr

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