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L’Etat vole au secours de la filière du livre

Guetté depuis plusieurs jours par la filière du livre, le dispositif d’aide dispose d’une enveloppe de 80 millions d’euros supplémentaires. Il accorde la priorité aux librairies et aux maisons d’édition indépendantes.

 

Après bon nombre d’allers et retours entre la rue de Valois et Bercy, complétés par de longs arbitrages entre l’Elysée et Matignon, le ministère de la Culture a révélé les nouvelles mesures de soutien en direction de la filière du livre, d’un montant de 80 millions d’euros. Elles intègrent une série de mesures d’urgence complétant les dispositifs mis en place depuis le début de l’épidémie de coronavirus, portant l’aide de l’Etat à 230 millions d’euros. Ces nouveaux moyens d’action seront intégrés au troisième projet de loi de finances rectificative présentée mercredi en Conseil des ministres. Un plan de relance du secteur devrait compléter le dispositif en septembre, portant le total des aides à 300 millions d’euros, selon Bercy.

 

En réalité, près de 150 millions d’euros ont déjà été dégagés dès la mi-mars, en faveur des librairies, des maisons d’édition et des artistes auteurs via, notamment, la création d’un fonds de solidarité. Les éditeurs et les librairies ont pu accéder, en parallèle, à des PGE d’un encours de presque 115 millions d’euros ainsi qu’à des mesures de chômage partiel. Par ailleurs, une première enveloppe de 5 millions d’euros avait été débloquée par le Centre national du livre (CNL) en direction des éditeurs, des librairies et des auteurs.

Priorité aux librairies…

 

Dans le nouveau dispositif, priorité a été donnée aux librairies. Générant peu de marge, disposant d’une trésorerie fréquemment réduite, elles évoluent en permanence, pour la plupart d’entre elles, sur le fil du rasoir.

 

« Or, ces librairies constituent le poumon économique de la filière. Ce sont elles qui vont permettre au secteur de redémarrer. Sans distribution, il n’y a pas de ventes de livres », estime-t-on au ministère de la Culture.

 

Concrètement, un fonds de soutien d’un montant de 25 millions d’euros sera mis en place au Centre national du livre (CNL), en lien avec les directions régionales des affaires culturelles (DRAC) pour permettre aux librairies indépendantes de faire face à leurs difficultés financières. En parallèle, l’Etat mobilisera une enveloppe de 12 millions d’euros, répartie sur 2020 et 2021, pour les aider à se moderniser.

…et aux maisons d’édition indépendantes

 

Les petites maisons d’édition indépendantes ont également été priorisées dans ces mesures d’urgence. « Evoluant moins dans une logique de ‘best-sellarisation’ que les grands groupes, ce sont souvent elles qui prennent le risque de publier de nouveaux talents qui apportent un regard différent », ajoute-t-on rue de Valois. Un fonds de soutien d’un montant de 5 millions d’euros sera mis en place au niveau du CNL, en lien avec les DRAC, pour soutenir financièrement les maisons réalisant un chiffre d’affaires compris entre 100.000 euros et 10 millions d’euros.

 

Enfin, plus de 100 millions d’euros vont être mobilisés par l’Etat auprès de l’Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC) sous forme de prêts. En parallèle, une réflexion va être entamée facilitant l’expédition d’ouvrages afin de rétablir un équilibre concurrentiel équitable au sein de la filière. Amazon n’est pas nommé expressément, mais son ombre flotte de façon insistante.

 

Il était temps d’agir. Comme l’automobile, le tourisme, l’hôtellerie, la restauration, l’aéronautique… le secteur de l’édition a payé un lourd tribut à l’épidémie. Selon un sondage du Syndicat national de l’édition, près de la moitié des éditeurs s’attendent à une perte comprise entre 20 et 40 % de leur chiffre d’affaires sur l’année 2020. La filière estime avoir subi un manque à gagner de 500 millions d’euros sur la période.

 

Pour autant, tout n’est pas résolu. Ainsi, les artistes auteurs, qui s’étaient mobilisés à l’occasion du Festival international de la bande dessinée d’Angoulême, semblent les grands perdants du jeu. Ayant déjà eu accès au fonds de solidarité entre mars et mai 2020, ils bénéficieront, certes, d’une prolongation de ce dispositif jusqu’à la fin 2020, ainsi que d’une exonération de cotisations sociales de quatre mois (de mars à juin), ainsi que d’un accès au programme de commande publique annoncé par le président de la République.

 

Mais la présidente du Conseil permanent des écrivains, l’auteure Bessora, insiste sur le fait que « les aides apportées aux maisons d’édition devront être conditionnées au paiement des droits d’auteur et des redditions de comptes ». Tandis qu’à Bercy, un certain nombre d’observateurs estiment le partage de la valeur entre éditeurs, libraires et auteurs « peu satisfaisant. Les auteurs sont peu aidés et une réflexion de fond est nécessaire ».

 

Lire : Les Echos du 9 juin

 

Jean-Philippe Behr

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